On les appelle des glaneurs et des déchétariens. Les uns fouillent les champs après les récoltes, les autres, les poubelles d’épiceries à la recherche d’aliments consommables. Et entre la fourche et la poubelle, des entrepreneurs comme Guillaume Cantin de La Transformerie revalorisent ces denrées par leur transformation et un retour sur les étals des commerces. Coup d’oeil sur trois initiatives citoyennes face à un enjeu de société : le gaspillage alimentaire.
Les glaneurs interviennent là où tout commence: dans les champs, juste après les récoltes. Le but ? Récupérer les légumes délaissés souvent pour des raisons de calibre jugé hors-norme. Geneviève Longère, consultante en métier de bouche et personne-ressource pour Slow Food Lanaudière (aujourd’hui intégré dans le convivium Slow Food Vallée de la Batiscan), nous parle du glanage, une activité qu’elle organise depuis plusieurs années près de Saint-Alexis-de-Montcalm, dans Lanaudière, sa terre d’accueil depuis plus de 30 ans.
Glaner, ce n’est pas faire son épicerie
Les glaneurs «aiment être dehors, décrit Geneviève Longère. Ils n’ont pas peur de se salir et récupèrent, en quelque sorte, par besoin vital». Des qualités mises à profit quelques minutes, pour quelques légumes. Car dans les champs, «on ne fait pas son marché», précise-t-elle. De surcroît, glaner ne permet ni de combler tous ses besoins alimentaires ni de s’approvisionner à longueur d’année ; la saison des récoltes est courte. «Le glanage se passe pour l’instant de fin septembre à début novembre, précise notre interlocutrice, entre autres parce qu’il est plus facile d’aller glaner des légumes racines plutôt que des bleuets.»
Ce ne sont pas non plus tous les légumes qui peuvent être ramassés: si vous aimez les asperges, sachez qu’«elles ont besoin de rester en terre pour refaire des pousses l’année d’après», illustre l’organisatrice.
Promenons-nous dans les champs
Que ce soit par curiosité ou par conviction, comment se retrouve-t-on à glaner un champ? S’il est facile d’identifier des lieux d’autocueillette, il n’existe pas de sites web sur lesquels s’inscrire à des activités de glanage. «ça passe par des connaissances, du bouche-à-oreille», explique Geneviève Longère. Les groupes Facebook comme Autosuffisance Québec — Glanage et Dumpster Diving regroupent également de précieuses informations, tant sur les lieux que sur le déroulement du glanage. Du côté de notre consultante, c’est en se promenant dans son coin de pays qu’elle a réalisé la quantité de légumes délaissés après les récoltes. Lui est alors venue l’idée d’organiser des sessions de glanage, mais non sans difficulté: «j’ai dû mettre le pied dans la porte pour pouvoir entrer au champ» explique-t-elle lorsqu’elle parle de la réceptivité des agriculteurs à sa proposition. N’allons pas pour autant caricaturer les travailleurs agricoles en de méchants paysans. Les raisons sont ailleurs: «Les agriculteurs ont parfois peur des accidents, raconte la consultante. L’un d’eux m’a aussi expliqué un jour qu’il craignait que ses acheteurs comme Provigo… soient choqués de voir les gens ramasser dans les champs.»
«Il faut alors les convaincre du bien-fondé du glanage, de son aspect solidaire et bénévole», ajoute-t-elle. Un travail qui s’avère beaucoup plus facile à faire auprès de la relève agricole : «Ceux qui veulent vraiment, ce sont les jeunes agriculteurs, ceux qui n’ont pas encore leur propre terre.»