Antonine Maillet, la bâtisseuse
Par Linda Pelletier
À lire en page 16
Invitée d’honneur au Salon du livre de Montréal 2019, Antonine Maillet nous a reçus dans son beau condo à Westmount. Accueillante et chaleureuse, elle nous a tout de suite mis à l’aise, malgré notre nervosité ressentie à l’idée de rencontrer cette légende vivante de la littérature francophone.
Quand nous l’interrogeons sur l’état de la francophonie au Canada, Antonine Maillet se dit optimiste. D’entrée de jeu, elle fait une distinction entre les Acadiens et les autres francophones du Canada, car l’Acadie est la première colonie européenne à s’établir en Nouvelle-France, quatre ans avant la fondation de la ville de Québec. Elle mentionne également que le Nouveau-Brunswick est la seule province à être officiellement bilingue. Notons que si le Nunavut n’est pas une province, ce territoire est officiellement trilingue.
Antonine Maillet avait à peine 10 ans quand le gouvernement du Nouveau-Brunswick a proclamé que la langue officielle de la province était l’anglais. La population de Bouctouche, sa ville natale, était à 95 % francophone contre 5 % anglophone. « C’était le pire des temps pour étudier la langue française en Acadie », affirme-t-elle. Elle admet qu’avec le gouvernement actuel au Nouveau-Brunswick, et ceux d’autres provinces comme l’Ontario, la lutte est encore difficile pour tous les francophones du Canada, mais elle croit « qu’on peut la gagner ».
Webster, l’esclavage raconté aux enfants
Par Mathieu Thériault
À lire en page 19
Webster est un personnage à part dans l’univers artistique québécois. Son nom ne vous dit peut-être rien, mais vous en avez sans doute quand même un peu entendu parler. À l’origine, c’est un rappeur de Limoilou à Québec, un musicien de talent, connu pour ses textes riches et engagés. Fils d’un père sénégalais et d’une mère québécoise, il s’efforce de faire mieux connaître l’histoire des Noirs – et de l’esclavage – au Québec et au Canada. Plus récemment, il a aussi été au centre de la controverse autour de la pièce SLu0100V de Robert Lepage, de tout le débat sur l’appropriation culturelle et le manque de diversité dans la scène artistique.
Dans les derniers mois, il a publié un livre jeunesse vraiment superbe intitulé Le grain de sable, qui raconte l’histoire d’Olivier Le Jeune, le premier esclave noir connu en Nouvelle-France. Le bouquin, magnifiquement illustré par ValMO, s’adresse aux ados, mais démontre à merveille toute l’horreur, l’incompréhension et la tragédie que pouvait ressentir un enfant africain qu’on venait arracher de force à ses terres pour en faire un esclave en Amérique. C’est de ce dernier projet dont nous voulions parler avec lui autour d’un café au Centre-Sud. Cependant, avec un esprit aussi allumé que celui de Webster, la conversation est évidemment allée ailleurs. Résumé d’un entretien comme on en voudrait plus.
Francine Ruel – Itinérance d’un proche : la souffrance des familles
par Alexandra Guellil
À lire en page 26
Dans son dernier roman Anna et l’enfant-vieillard, Francine Ruel nous plonge dans un univers à la fois intime et fictif. C’est celui d’Anna, son personnage principal, une maman couturière, qui malgré tout son doigté et toute son expérience, ne parvient pas à recoudre la vie de son fils, Arnaud, devenu toxicomane et itinérant.
Comme de nombreux parents, Anna est une de ces mamans qui se remettent en question en se demandant ce qu’elle n’a pas fait de la bonne façon ou ce qu’elle aurait dû faire mieux ou autrement. Cette culpabilité écrasante est le leitmotiv du nouveau roman de Francine Ruel. À travers ces pages, la comédienne et autrice québécoise nous invite à nous questionner sur ce qu’elle nomme « les dommages collatéraux » de l’itinérance et des problèmes de santé mentale : la souffrance des familles.
De plus en plus, au Québec comme ailleurs dans le monde, on commence à admettre que le rôle des aidants se transforme au fur et à mesure de l’évolution de la personne itinérante, dépendante ou malade. Or, les familles elles-mêmes sont souvent laissées pour compte dans ces problématiques, alors même qu’elles font aussi partie des solutions.
L’Itinéraire a eu l’occasion de s’entretenir avec Francine Ruel qui envoie avant tout un message d’espoir à toutes ces personnes qui souffrent en dedans, qui sont finalement impuissantes face aux difficultés que traversent leurs proches.