Vous connaissez l’expression : les arbres cachent la forêt ? On pourrait bien dire la même chose de nos frigos.
Il arrive, à pas mal tout le monde, de ne pas voir ce qui se trouve sur les tablettes de son réfrigérateur. Les plats et autres Tupperwares relégués au fond finissent par devenir ce que j’appelle «des projets scientifiques». Le contenu des petits pots qu’on va utiliser «un jour» changent de couleur et de texture alors que les restants du souper d’il y a trois semaines sont à la veille de cogner à la porte du frigo pour demander de sortir. On rigole, mais pas tant.
Quand on pense que la famille québécoise moyenne produit un peu plus de 2kg de déchets alimentaires organiques par semaine, soit l’équivalent de 1100$ par année en bouffe, il y a de quoi se désoler.
Il fut un temps ouu0300 ne pas finir son assiette ou gaspiller des aliments nous valait une réprimande bien sentie et culpabilisante à l’effet que «des petits enfants dans le monde n’ont rien à manger, eux». Et ce n’est pas faux. Pas besoin de regarder très loin ; à Montréal seulement, on compte le plus haut taux d’insécurité alimentaire au Canada. De 13,6% avant la pandémie, le pourcentage de ménages qui peinent à manger à leur faim a grimpé à 22%.
Trop de nourriture prend encore le chemin des ordures ou du bac à compost. Selon le Conseil National Zéro Déchet, 63% des fruits, légumes et restes de table que nous jetons auraient pu être consommés.
Et puis, depuis le début de la pandémie, on achète 61% de plus de nourriture qu’avant. Parce que, en grande partie, on cuisine davantage. On a plus de temps. Mais on en jette plus aussi.
Plus conscients
Heureusement, la conscience antigaspillage fait son chemin au Québec et dans le monde. Les organismes se mobilisent et sensibilisent les gens à la nécessité de faire attention à notre façon de consommer et de gérer nos aliments. On compte de plus en plus d’adeptes qui se sont donnés comme mission de réduire drastiquement leurs déchets. En effet, des groupes zéro-déchets et antigaspillage se multiplient sur les réseaux sociaux.
Du côté de la récupération d’aliments, on a même conçu des applications pour permettre aux consommateurs de se procurer à une fraction du prix des aliments au bord de la date de péremption, ce qui permet de réduire le gaspillage.
Chez Moisson Montréal, qui fait de la récupération alimentaire son cheval de bataille, la plus grande banque alimentaire du pays distribue 35% plus de kilogrammes de nourriture par rapport à l’an dernier. Ces denrées sont principalement des excédents des restaurants fermés et du réseau hôtelier. D’ailleurs, Moisson Montréal approvisionne depuis des années la cuisine de L’Itinéraire et les sacs d’épicerie destinés aux camelots, comme elle le fait auprès de centaines d’organismes communautaires de la métropole.
De plus en plus, le gaspillage alimentaire est pointé du doigt comme un des grands maux de notre société. Mais contrairement à d’autres problèmes qu’on pourrait croire insurmontables, nous avons un pouvoir direct d’agir. Il s’agit seulement d’en faire son affaire et de passer à l’action.
Dans ce numéro, on vous parle d’initiatives qui vont dans ce sens, dans un dossier bien étoffé de notre journaliste, responsable de la formation des camelots, Karine Bénézet.
Et vous, si vous avez des suggestions ou des conseils antigaspillage, on aimerait les connaître. On aime toujours vous lire. N’hésitez pas à nous envoyer un mot à: courrier@itineraire.ca.