Au début du mois d’octobre, environ 74% de la population était pleinement vaccinée à deux doses au Québec. L’Itinéraire vulgarise ici plusieurs notions liées à la vaccination avec deux experts dans leur domaine respectif : Jean Barbeau, microbiologiste et responsable de la prévention et du contrôle des infections à l’Université de Montréal et Louis-Philippe Lampron, professeur à la faculté de droit de l’Université Laval.
1 – Les vaccins à ARN messager modifient nos gènes (ADN).
Jean Barbeau : Faux. Ce n’est pas de la thérapie génique. Le principe des vaccins est toujours le même : administrer un microbe à notre organisme afin d’induire une réaction immunitaire. Nos cellules sont exposées aux protéines d’un virus pour permettre à notre organisme de reconnaître et de combattre le «vrai» agent infectieux avec les anticorps et les cellules immunitaires que le vaccin lui aura permis de développer. Les vaccins à ARN messager ne contiennent aucune protéine du virus. Ils contiennent plutôt du matériel génétique (ARN) qui entre dans des cellules et les incite à produire les protéines requises. Dans le cas de la COVID-19, il s’agit de protéines de spicule. Ce sont ces pointes rouges que l’on voit habituellement sur les images de la molécule du SARS-CoV-2. Ces vaccins n’ont pas la capacité d’affecter, d’interagir ou d’altérer notre ADN de quelque manière que ce soit. L’ARN messager contient des instructions qui permettent de fabriquer une protéine du virus sur lequel on veut qu’il agisse. Le défi du vaccin est de stabiliser cet ARN messager jusqu’au moment où il sera intégré à nos propres cellules. L’ARN entre dans nos cellules, ça, c’est vrai et il faut qu’il y entre pour transmettre des instructions. Mais nos cellules déchiffrent ces instructions et assez rapidement il se dégrade. Pour que l’ARN puisse s’intégrer à nos cellules, il aurait fallu des enzymes particulières qu’il ne possède tout simplement pas. Cette affirmation n’a donc aucun fondement scientifique.
2 – Avec deux doses, on est immunisés à 100%. Plus besoin de respecter les mesures sanitaires.
Jean Barbeau : Faux. Aucun vaccin n’est efficace à 100 %, que ce soit celui de la COVID-19 ou celui de la rougeole. L’efficacité d’un vaccin est toujours confrontée à la génétique d’un individu. Les vaccins protègent de plusieurs façons: ils peuvent empêcher la transmission de la maladie, réduire la sévérité de l’infection, ou les taux d’hospitalisation ou de mortalité. Mais ce ne sont pas des caractéristiques qui se développent dans tous les vaccins. Les trois vaccins contre la COVID-19 assurent une protection contre les hospitalisations. On a 30 fois moins de risque d’être hospitalisé ou d’en décéder. C’était l’idée avec la situation d’urgence, on voulait s’arranger pour que la maladie ne tue plus ou ne permette plus de développer des infections sévères. On espérait aussi réduire le taux de transmission de la maladie en se disant que si le virus ne se transmettait pas, la pandémie s’achèverait. Mais, le vaccin a des lacunes. C’est pour cela que l’on dit que l’on veut que le RT (l’indice de transmission) soit en dessous de 1. Et comme ce n’est pas encore le cas, il faut s’adjoindre d’autres mesures sanitaires pour continuer de contrôler la propagation du virus. Oui, des personnes doublement vaccinées peuvent se retrouver à l’hôpital, mais bien souvent, elles ont des comorbidités ou étaient déjà vulnérables.
*3 – Il faudra se faire vacciner chaque année.
Jean Barbeau : Ça dépend de la durée de l’immunité du vaccin. C’est un sujet à controverses. Il y a plus de 500 publications scientifiques qui sortent en moyenne chaque semaine. Au début, on croyait que la vaccination apportait une protection de cinq ans. Ça ne semble plus être le cas et cela varie en fonction des groupes d’âge. On a un vaccin qui, dépendamment de sa durée d’immunité, déterminera si on a besoin de se faire vacciner chaque année. Le virus du SARS-CoV-2 mute et de nouveaux variants apparaissent. Certaines personnes sont plus vulnérables que d’autres. C’est pour cela qu’on étudie la possibilité d’une troisième dose pour les plus vulnérables d’entre nous qui ne sont pas adéquatement protégés en raison de leur immunité qui diminue plus rapidement.
* Erratum. Une erreur s’est glissée dans le magazine au 3e énoncé. La bon texte est corrigé sur cet extrait en ligne.