Ce n’est pas d’hier que des hypothèses et articles clamant l’inefficacité voire la dangerosité des vaccins circulent sur les réseaux sociaux, faisant ainsi de nombreux adeptes anti-vaccins. Conséquence : des maladies éradiquées par les mêmes vaccins décriés refont surface. C’est le cas de la rougeole, disparue depuis le début des années 2000 et qui a réapparu dans l’État de New York récemment. D’où l’importance de ne pas croire tout ce que l’on lit sans vérifier d’abord.
Éduquer et sensibiliser les jeunes contre les fausses nouvelles, c’est la mission que se sont donnés plusieurs professionnels des médias en créant la formation #30 secondes avant d’y croire.
Une des initiatrices du projet et journaliste d’expérience, Line Pagé, a vu le monde des médias évoluer au fil des ans. Elle a constaté qu’il était de plus en plus difficile de dissocier le vrai du faux. « Il est important de développer un esprit critique dès un jeune âge. Je pense que ce qui est difficile aujourd’hui, c’est que l’information arrive de partout et sous plusieurs formats, explique-t-elle en mentionnant les réseaux sociaux les plus populaires comme Twitter, Facebook et Instagram. Tout le monde produit des images et de l’information. »
Cette initiative proposée par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) et par l’Agence Science-Presse (ASP) permet aux jeunes de 13 à 17 ans de se sensibiliser aux fausses nouvelles et autres canulars grâce à des ateliers offerts par des journalistes bénévoles.
Intérêt monstre
La formation d’une heure, qui est subventionnée en totalité par le ministère de l’Éducation, est offerte directement dans les classes. Les professeurs n’ont qu’à s’inscrire pour que leurs élèves puissent profiter de l’expérience. Le jumelage s’effectue par région, selon le nombre d’inscriptions, puisque les ateliers sont offerts partout au Québec.
L’an dernier, 2800 étudiants avaient bénéficié de cette formation. Line Pagé estime qu’environ 4000 élèves auront participé aux différentes activités en 2019. L’équipe était surprise par l’engouement face au projet. « L’an passé, nous n’avions pas fait de publicité et pourtant plusieurs personnes démontraient de l’intérêt pour notre projet. On est un peu débordés, pour être honnête », sourit-elle.
8,5% des utilisateurs de Facebook ont déjà partagé une fausse nouvelle
65 ans +
sept fois plus susceptibles de partager une fausse nouvelle sur Facebook que les 18-29 ans
Attraper Pikachu
Les fondateurs de #30 secondes avant d’y croire, Eve Beaudin, Jeff Yates et Line Pagé, ont pris le soin de choisir des thèmes qui intéressent les jeunes pour construire la formation, comme les jeux de Pokémon, les influenceurs et les fausses images circulant sur Instagram.
Durant les activités, les élèves doivent dénicher des fausses nouvelles cachées dans des articles parfois très loufoques. Par exemple, une nouvelle indique qu’un carambolage a été causé par un homme qui voulait attraper Pikachu sur l’application Pokémon Go. Pour arriver à distinguer le vrai du faux, ils doivent prendre le temps d’observer les nouvelles et briser le réflexe de partage instantané auquel ils ont été habitués.
Les élèves peuvent aussi accéder au site internet 30secondes.org pour compléter leur formation grâce à de courtes capsules récapitulatives portant sur des enjeux tels que le rôle des médias, l’impact et l’histoire des fausses nouvelles et bien d’autres. Le site est convivial et facile d’accès. On s’y retrouve facilement lorsque vient le temps de visualiser des capsules vidéo ou encore de consulter les liens utiles.
Pas que pour les jeunes !
Le succès de #30 secondes avant d’y croire confirme qu’en matière de fausses nouvelles, il existe bien un besoin de formation. Mais pas seulement pour les plus jeunes.
En effet, selon une étude menée par Andrew Guess, politologue à l’Université de Princeton, les plus de 65 ans sont sept fois plus susceptibles de relayer de la désinformation sur Facebook que les 18-29 ans. Il avance deux hypothèses pour expliquer ce phénomène : d’une part, la difficulté des personnes âgées à s’adapter à l’environnement numérique, et d’autre part les problèmes liés à la mémoire dont certaines personnes sont atteintes.
Pour répondre à ce besoin, les fondateurs de #30 secondes avant d’y croire ont décidé d’élargir la formation. « Nous sommes présentement en attente de subvention, mais nous avons déjà comme plan d’offrir les activités dans les bibliothèques de quartier », précise Mme Pagé.
Mais pas question de transposer la formation telle quelle. Pour l’adapter à un public plus large, les jeux Pokémon seront laissés de côté pour faire place à des sujets plus politiques, comme les canulars que l’on peut voir passer en période électorale.
Détecteur de rumeurs
Au Québec, #30 secondes avant d’y croire n’est pas le seul projet qui s’attaque à la désinformation et qui sensibilise le public sur leurs manières d’utiliser des réseaux sociaux.
Le site de l’Agence Science-Presse, par exemple, a mis en place un détecteur de rumeurs. Celui-ci permet aux utilisateurs de soumettre, vérifier et démystifier certaines informations. Selon la FPJQ, ce site est un modèle en matière de vérificateur de nouvelles.
Dans le reste du Canada, la plateforme Actufuté est aussi une référence pertinente. Sans nécessairement offrir un outil pour vérifier les nouvelles, ce site propose un jeu interactif appelé Contre-fait, dont l’objectif est simple : détecter les vraies et les fausses nouvelles parmi un ensemble de photos, liens et autres renseignements fournis sur le site. Les utilisateurs sont ensuite notés sur leur performance.
Enfin, ailleurs dans le monde, plusieurs autres modèles de sites existent pour aider les internautes à se retrouver dans la marée d’informations du web. Par exemple, le journal Le Monde, en France, a créé l’outil Décodex, qui permet aux utilisateurs de copier-coller unlien pour s’assurer de sa fiabilité.
Conseils pour vérifier l’authenticité d’une nouvelle
Fiable :
Il est important de vérifier qui a rédigé l’article et si le texte est signé. Est-ce que c’est une source fiable ?Vérifier les sources :
L’article doit présenter plusieurs points de vue. L’auteur doit aussi avoir utilisé des sources fiables, soit des professionnels et des gens qualifiés sur le sujet.Vérifier la provenance :
Il est également important de vérifier l’adresse URL. Il ne faut pas toujours se fier aux informations recueillies sur les réseaux sociaux ou encore sur les blogues.Pourquoi ?
Est-ce que l’objectif de l’article est d’informer ? Il faut garder un esprit critique envers l’information.Crédit : BAnQ